Biens communs - Les œuvres de la Bibliothèque nationale bientôt privatisées ?
Depuis Bastamag le 8 février 2013
Par Sophie Chapelle
La Bibliothèque nationale de France est sous le feu des critiques après avoir noué deux partenariats public-privé avec plusieurs firmes dans le cadre des investissements d’avenir. Ces accords, signés le 17 janvier, visent la numérisation de 70 000 livres et 180 000 disques qui relèvent en partie du domaine public. La plupart des documents ne seront pas diffusés en ligne, mais uniquement sur place à la BnF.
Son président, Bruno Racine, soutenu par le ministère de la Culture, met en avant des arguments d’efficacité économique. Et précise que la numérisation des 70 000 livres anciens sans partenariat aurait pris 25 ans.
Les entreprises privées partenaires ont en échange obtenu une exclusivité de 10 ans pour exploiter commercialement les livres numérisés.
Si l’accès gratuit au contenu demeure possible sur le site même de la BnF, il sera donc payant pour la plupart des institutions culturelles françaises et étrangères, comme pour les particuliers qui ne pourraient se déplacer à la bibliothèque.
« Il s’agit bien de vendre des accès payants sous forme d’abonnement, y compris aux bibliothèques et universités françaises, et c’est précisément ce qui a soulevé un tollé de la part de toutes les grandes associations professionnelles du secteur [1] », explique le juriste et bibliothécaire Lionel Maurel sur le site ActuaLitté.
Contrats encore confidentiels
« Partout en France et dans le monde, ce sont les chercheurs, les étudiants, les enseignants, les élèves, les amateurs de culture, les citoyens qui se trouveront privés de l’accès libre et gratuit à ce patrimoine », dénoncent dans un communiqué commun COMMUNIA, l’Open Knowledge Foundation France, Creative Commons France, La Quadrature du Net, Framasoft, et SavoirsCom1.
D’autre part, un rapport du Comité des sages estime que des exclusivités commerciales peuvent être concédées à des firmes privées pour 7 ans maximum, mais insiste sur la nécessité que les documents du domaine public restent accessibles gratuitement en ligne, y compris dans un cadre transfrontalier.
Alors que le détail des accords n’a toujours pas été rendu public, plusieurs organisations demandent « le retrait sans délai » de ces partenariats.
Notes
[1] Les différentes associations de bibliothèques et de bibliothécaires : ABF, ADBU, IABD.
Fil Info » O.P.A.