Qui dort tranquille ?
Le 11 juin 2013
Yep !
Le 23 juillet 2012, le Droit Au Logement de Bordeaux était en état d’alerte. 28 personnes, dont 11 enfants, allaient être jetées à la rue du squat qu’elles occupaient rue Cornac.
Des demandeurs d’asile n’avaient trouvé d’autre refuge que ce lieu réquisitionné – face à l’urgence - en toute légitimité.
Les appels de l’association, tant au Préfet qu’aux Partis, étaient restés sans suite et elle n’avait pu compter que sur elle-même pour trouver des solutions.
Un an plus tard, ce sont de nouveau 25 familles, soit 95 personnes, qui se retrouvent à la rue. Et bien sûr, rien à l’horizon en terme de re-logement pérenne ou même provisoire.
Mais les expulsions ou menaces d’expulsions ne concernent pas que les personnes dites « d’origine étrangère ».
C’est aussi notre jeunesse créative et consciente que l’on tente de faire « rentrer dans le moule ».
Depuis mars dernier, un élan de vie et d’envie occupe une grande maison vide appartenant à la Communauté Urbaine de Bordeaux à Bègles.
L’Oukaze, lieu de partage et d’échanges, de réflexions et d’amitiés franches, est devenu un espace indispensable pour retrouver le sens simple de la vie : être et être ensemble.
C’est déjà trop pour un état autoritaire, trop pour des villes que l’on veut policées, lisses et sans rature, c’est déjà trop quand il s’agit encore et toujours de donner du droit à la propriété privée et de l’idéal au slogan « Un toit pour tou-te-s ! ».
Le 21 juin, après avoir comparu-e-s en mai dernier devant le Tribunal d’Instance de Bordeaux, les habitant-e-s de L’Oukaze sauront combien de jours leurs sont comptés avant qu’ils-elles ne doivent plier bagages et trouver ailleurs un lieu d’émancipation et de liberté.
Mais les expulsions ou menaces d’expulsions ne concernent pas que les jeunes audacieux.
Ce sont aussi toutes ces personnes que nous ne connaissons pas, qui n’ont pas de « réseau », qui sont isolées, qui sont désemparées et sans soutien, anonymes dont on fracasse la vie sur le grand autel du Capital : pas d’argent, pas de logement ! Point barre !
Ce sont aussi ces milliers d’autres que l’on n’a même plus besoin d’expulsées puisqu’elles n’ont déjà plus de maison, qu’il faut tout de même aujourd’hui déportées, parce que vous comprenez, ça fait un peu sale tous ces gens sales dans nos salons alors qu’il s’agit d’agrandir l’espace vital de bourgeois pas toujours bohèmes mais aux revenus plus douillets.
Mais qui est ce « on » qui expulse, fracasse, déporte et regarde sa jeunesse avec mépris ?
Vous savez que ce « on » n’est ni de droite, ni de gauche, ni d’extrême-gauche ni d’extrême-droite.
Ce « on » s’appelle « pouvoir », « domination », « oligarchie », « corruption ».
Ce « on » s’appelle « cols blancs », « ronds de cuir » et « petits fours ».
Ce « on » s’appelle « je me fous de ta gueule tous les jours avec ma télé, avec mes journaux, avec mon internet et je veux que tu t’endormes ».
Ce « on » articule pour nous dire : « Marche ou crève ! Tiens non plutôt, crève ! ».
Et nous crevons !!!
Ce qui est sûr, c’est qu’à l’heure où nous écrivons ces quelques lignes, cet énième amer constat, ce « on » dort tranquille, rêvant peut-être, tandis que des vies à la dérive n’ont nul lieu pour s’abriter.
Est-ce que cela n’est vraiment pas assez ? N’avons-nous plus du tout de bave ? Nos gorges seraient-elles nouées, nos muscles sans courage, nos cœurs sans conviction ? Qu’avons-nous fait de notre colère et de notre sentiment de justice ?
Car il n’y a pas que ce « on » qui dort.
Moins tranquillement sans doute, nous restons cloîtrés, tenus en laisse par quelques espèces sonnantes et trébuchantes tandis que tant de choses autour de nous s’effondrent.
Tête dans le sable, asphyxiés, prisonniers d’un environnement anxiogène, nous n’osons plus affirmer les rêves qui nous animent et peut-être même, dans l’inconfort de nos nuits emmurées, nous ne rêvons plus.
Est-ce que cela n’est vraiment pas assez ? N’avons-nous plus du tout de bave ?
Le mardi 12 juin 2013, plusieurs associations appellent à un rassemblement, à 14h, place Pey Berland à Bordeaux, en soutien aux demandeurs sans asile.
Elles envisagent d’y camper si elles n’obtiennent pas de solutions immédiates.
Si c’est le cas, elles auront besoin de notre solidarité effective, de nos mots devenus actes, pour obliger La Préfecture à appliquer la loi et à fournir des logements à ces personnes dont elle a la responsabilité.
Ce n’est pas le cas de L’Oukaze qui ne demande aucune aide à l’Etat pour être autonome et s’auto-géré.
Il faudra aussi être présents pour défendre cette conception de la vie où il est possible de refuser de donner un prix à chaque chose, où la liberté s’exerce au plus près, où le bien-être individuel profite au bonheur collectif et inversement.
Bordeaux, triste et belle endormie, crache enfin le morceau de pomme que tu as en travers de la gorge et réveille-toi !
Solidairement,
L’Orchestre Poétique d’Avant-guerre - O.P.A
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Compléments d’info
m. pour O.P.A - La loi de réquisition - Interview Avril 2009
Bordeaux - Mardi 11 juin 2013 - Appel à solidarité - Demandeurs d’asile à la rue
14h – Place Pey Berland – Bordeaux
http://gironde.demosphere.eu/rv/2428
Mai 2013 - Expulsions à gogo malgré les promesses
http://www.opa33.org/expulsions-a-gogo-malgre-les-promesses.html
17 mai 2013 – L’Oukaze vaincra !
http://www.opa33.org/l-oukaze-vaincra.html
25 juillet 2012 – Un squat du D.A.L expulsé
http://youtu.be/LI8ZcshUAwk
Septembre 2012 – Bordeaux : la misère se propage
http://www.opa33.org/bordeaux-la-misere-se-propage.html
Octobre 2012 – Bordeaux : chasse aux rroms !!
http://www.opa33.org/bordeaux-chasse-aux-rroms.html
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